Dynamiser ses ventes, mieux connaître ses clients, créer avec eux des liens durables voire co-construire des offres : les vertus de la fidélisation en B to B ne manquent pas. Mode d’emploi.
1. Comprendre les spécificités
Quel rapport entre les cartes de fidélité qui gonflent votre portefeuille de shopper averti et les programmes montés par les fournisseurs pour caresser leurs clients entreprises dans le sens du poil ? Aucun ? Pas si sûr… La fidélisation client sonne, il est vrai, comme une technique « mass market », à grand renfort de cartes, de points, de « miles » accumulés et autres avantages hauts en couleur.
Pourtant, les fournisseurs d’entreprises ont tout intérêt à monter leur programme : « Il y a deux objectifs à la fidélisation en B to B, explique Étienne Oddon, cofondateur et président de Leoo, spécialiste du marketing cross-canal. D’abord, stimuler les ventes et ensuite, mieux connaître ses clients. Car un programme de fidélisation bien mené est une mine de renseignements ! »
Pour arriver à ses fins, la marque doit jouer sur l’émotion : valoriser son public-cible, l’étonner, le surprendre. Mais attention : un patron de PME n’est pas une consommatrice lambda. « Les chefs d’entreprise ont des attentes fortes vis-à-vis de leurs fournisseurs, rappelle Laurent Ollivier, directeur général d’Aressy, agence de communication B to B. Il ne s’agit pas de créer de l’achat d’impulsion, mais d’entretenir une relation pérenne. Pour cela, il faut s’assurer que les fondamentaux de la relation commerciale sont respectés avant d’engager un programme de fidélité. »
Aucun programme de fidélisation ne pourra « rattraper » un produit défectueux ou livré en retard…
2. Définir ses cibles
En B to C, la cible du programme de fidélité est claire : Mademoiselle Unetelle, acheteuse ponctuelle ou régulière auprès de telle enseigne. En B to B, la cible peut être multiple selon les typologies d’entreprise. Entre la vente-projet auprès d’un pool d’acheteurs via un marché réglementé, et le réassort d’une TPE en fournitures de bureau, il y a un fossé…
Dans le cas des clients TPE et PME, par exemple, faut-il cibler l’assistante du patron, qui s’occupe des commandes de fournitures et consommables, ou le dirigeant lui-même ? Et quid des enseignes professionnelles, où le référencement est négocié en centrale, mais les produits implantés localement par les responsables de points de vente ? « L’identification du ou des décisionnaires est cruciale car la fidélisation implique un statut, celui du client privilégié », prévient Étienne Oddon (Leoo).
Concrètement, il peut s’agir du dirigeant de PME, du directeur de magasin qui implante les matériaux de construction dans son agence locale, de l’acheteur ou du responsable frais généraux si la structure cliente en comporte… L’important est d’avoir affaire au bon décideur.
Enfin, il est possible de décliner son programme de fidélité en fonction des profils de clients : dans le monde informatique, les revendeurs sont régulièrement estampillés « gold » ou « silver » suivant leur volume d’achat auprès de la marque. Il est intéressant d’animer ces différentes catégories par des programmes de fidélité spécifiques.
3. Adopter la bonne mécanique
Comme dans le B to C, la mécanique doit être simple, transparente et incitative. « Il faut expliquer clairement la manière de récolter des points – le earn – et la manière de les dépenser – le burn. Et contrairement au B to C, on peut dire sans complexe à des clients entreprises qu’à partir de tel niveau de chiffre d’affaires, ils entrent dans telle catégorie de partenaires privilégiés », indique Étienne Oddon (Leoo).
Un système de comptabilisation des points reste la technique idéale : « Les clients ont ainsi une contrepartie à leur niveau d’engagement », ajoute l’expert. À travers son agence Kiss The Bride, le groupe Loyalty Company, spécialisé dans la fidélisation clients, a monté un programme dédié aux salons de coiffure clients de L’Oréal Professionnel. Il a commencé par analyser le comportement d’achat de chaque salon pour déterminer son potentiel, puis il a créé des supports personnalisés (pack de bienvenue, vidéo de lancement, centre d’appels et plateforme web) « afin que la marque entretienne une relation individualisée, engageante et profitable avec ses salons », explique Guillaume Chollet, président fondateur de Loyalty Company.
« Le digital est bien sûr au coeur de tout programme de fidélité, précise Guillaume Chollet. Avec, dans l’idéal, une démarche multi-canal qui va appuyer son efficacité. » Par exemple, lorsqu’il s’agit de convier par e-mail le club clients à un événement, de le remercier, bref, d’animer le programme.
4. Choisir des récompenses
Qui n’aimerait pas recevoir un téléviseur dernier cri, ou une table de ping-pong pour équiper le coin détente de ses collaborateurs ? Comme dans un programme de fidélité B to C, les clients B to B apprécient les cadeaux : machines à café ou barbecues, par exemple… « Les clients professionnels adorent recevoir ce type de matériel en dotation car ils en font profiter leurs salariés avec des barbecue-party dans l’entreprise dès les beaux jours », illustre Laurent Ollivier.
Mais en B to B, les clients apprécient surtout de recevoir de quoi améliorer eux-mêmes leur business. Il peut s’agir de services gratuits (mais payants pour le commun des clients), de meilleures conditions d’achat, de matériel offert, etc. Dans le programme de fidélité de L’Oréal Professionnel développé par Loyalty Group, les coiffeurs peuvent gagner de l’équipement. « Aux entreprises, il faut apporter de la valeur ajoutée : des facilités de livraison, de stockage, de prise de commande, des tarifs préférentiels pour découvrir un nouveau produit… Et éviter de concéder trop de remises », résume Étienne Oddon (Leoo).
Dans tous les cas, il est important de personnaliser les avantages. Enfin, pour créer une adhésion rapide, les premières récompenses doivent être atteignables rapidement.
5. Animer le programme
Il est indispensable de faire vivre et de rythmer le programme de fidélité. Il peut s’agir, par exemple, d’organiser des périodes où les achats effectués accorderont le double des points habituels. Ou alors, de coupler le programme avec l’offre d’un partenaire, et d’offrir un cumul de points intéressant.
Le Club Accorhotels s’associe ainsi avec le loueur de véhicules Hertz pour proposer le triplement des points de fidélité en cas de location d’un véhicule, lequel sera surclassé et proposé avec une remise. « On peut animer le programme en diffusant de l’information, par exemple un livre blanc sur un sujet qui préoccupe la clientèle de professionnels », suggère Étienne Oddon.
Dans le même registre, podcasts, tutoriels et événementiel sont des outils intéressants pour attirer l’attention des clients et les valoriser. « Faire profiter les clients privilégiés d’un show, d’une rencontre conviviale avec les autres membres, d’un cocktail… Ce sont autant de façons de marquer les esprits », rappelle Laurent Ollivier (Aressy).
Tenez compte des contraintes de votre cible, par exemple en envoyant des messages au moment où elle est le plus disponible. On sait que les artisans du bâtiment démarrent leur journée très tôt et qu’ils sont disponibles le soir. Une gérante de salon de coiffure sera, pour sa part, moins submergée en début de semaine que le vendredi ou le samedi.
6. Faire fructifier les résultats
L’un des objectifs du club de fidélité est de collecter de l’information sur les comportements et les besoins de ses clients. C’est possible via la plateforme digitale mise en place pour le programme, couplée au CRM. On pourra ainsi comparer le comportement d’un consommateur du programme avec celui d’un consommateur hors-programme, regarder l’évolution du chiffre d’affaires qu’ils génèrent, voir s’il correspond à des animations ou incitations particulières. De façon à adapter son approche tactique.
Il est aussi possible d’interroger les clients aux moments-clés : lors du « earn » et lors du « burn », ils se rapprochent de la marque qui les gratifie et sont alors plus disposés à livrer leur sentiment sur le programme, leurs attentes de cadeaux, leurs projets d’achat, etc.
Enfin, rien de tel qu’un club de clients fidèles pour organiser des réunions, des focus group où l’on pourra les faire participer à l’élaboration d’un nouveau produit ou service, les sonder sur leurs besoins et sur leur vision du marché. C’est un acte fort de valorisation du client.